Dahmane El Harrachi n’était pas simplement un artiste, il était une légende vivante, un écho profond résonnant dans les âmes des Algériens et au-delà.
Avec une voix rocailleuse, telle une mélodie ancestrale, il a su capturer les battements de cœur d’une société en pleine mutation. Sa musique, unique en son genre, a transcendé les frontières du chaâbi pour devenir une véritable révolution poétique.
Alors que le chaâbi traditionnel évoquait souvent des thèmes anciens, Dahmane, lui, a osé briser les conventions. Il a donné vie à des poèmes chantés qui parlaient des douleurs et des espoirs des Algériens, en particulier ceux déracinés, vivant en France, loin de leur terre natale. Sa chanson culte «Ya rayah» est devenue le cri du cœur d’une génération en quête de réconfort, un chant d’exil qui a résonné aux quatre coins du monde.
Né dans la wilaya de Khenchela mais ayant grandi à Alger, Dahmane a découvert son amour pour la musique dès son plus jeune âge. Le banjo, cet instrument indissociable du chaâbi, est devenu son fidèle compagnon. A peine devenu majeur, il s’est fait remarquer par les grands noms de l’époque, comme Cheikh El Hasnaoui, avec qui il a partagé la scène pour la première fois au Café des artistes à Paris en 1952. Mais ce n’était que le début. Dahmane El Harrachi a rapidement conquis le public avec son approche novatrice du chaâbi, combinant mélodies envoûtantes et poésie poignante. Ses chansons telles que «Behdja bidha ma thoul» et «Kifach nensa biled el khir» ont touché les cœurs de tous ceux qui les ont écoutées. En optant pour un langage populaire tout en conservant la beauté poétique, il a su parler à toutes les couches de la société, faisant de ses chansons des hymnes populaires.
Dahmane El Harrachi, c’était aussi la capacité rare de fragmenter la vie en une multitude de thèmes, abordant tour à tour l’amitié, la trahison, la nostalgie et tant d’autres sujets avec une profondeur et une sensibilité incomparables. Sa poésie, bien que simple en apparence, regorgeait de métaphores subtiles et d’envolées lyriques qui ne laissaient personne indifférent.
Le 31 août 1980, sur une route traîtresse d’Aïn Benian, Dahmane El Harrachi nous a quittés. Il avait seulement 54 ans, mais son héritage est immortel. Aux côtés des maîtres comme El Hadj Mhamed El Anka, Amar Ezzahi et El Hachemi Guerouabi, le nom de Dahmane El Harrachi brillera à jamais dans le firmament de la musique algérienne.