En Algérie, l’expérience de lutte contre le phénomène des incendies de forêt a démontré son caractère assez sensible, au-delà du fait qu’il soit un phénomène, somme toute naturel, dû au réchauffement excessif du climat.
Afin de ne pas rééditer les scénarios des années précédentes et anticiper sur certains aléas, le Gouvernement algérien a concocté un plan inédit anti-feux de forêt, où tous les moyens, matériels et humains, seront mobilisés, en coordination avec les départements ministériels concernés, à l’effet de prévenir et de lutter contre les feux de forêt.
L’Algérie, comme beaucoup de pays du bassin méditerranéen, est particulièrement exposée à certains phénomènes, comme les inondations, les sécheresses et, surtout, les incendies de forêt. Une situation qui impose la mise en place de dispositifs de prévention, de plus en plus précoces et surtout dynamiques et proactifs, en anticipant les risques, au lieu de se contenter de la gestion des catastrophes.
65 colonnes mobiles et plus de 500 unités opérationnelles d’intervention
Contacté par nos soins, le chargé de l’information, au niveau de la Direction générale de la Protection civile (DGPC), Nassim Bernaoui, a fait part d’«une stratégie nationale proactive, pour faire face aux feux de forêt durant l’été et ce, à partir du mois de mai jusqu’à la fin septembre 2024, à travers la mobilisation de 65 colonnes mobiles et plus de 500 unités opérationnelles d’intervention».
Interrogé sur les tenants et aboutissants de cette stratégie, notre interlocuteur nous a indiqué, qu’«elle repose essentiellement, sur les colonnes mobiles, avec une moyenne d’une colonne pour chaque wilaya, et de deux à trois colonnes, pour les wilayas à forte densité forestière, outre la réquisition de tous les moyens, humains et matériels, au niveau des unités principales et secondaires».
Et pour assurer une couverture maximale, à l’effet de faire face aux feux de forêt, le capitane Nassim Bernaoui n’a pas omis d’évoquer, «le rôle de l’unité aérienne de la Protection civile, qui intervient dans les zones inaccessibles, pour sécuriser les citoyens et leurs biens, le plus rapidement possible, outre le soutien apporté par l’Armée nationale populaire (ANP), dans le cadre de la lutte contre les feux de forêt, et les moyens mobilisés par les autres secteurs».
L’importance de mobiliser toutes les franges de la société et d’intensifier le travail de proximité, soulignée
Aussi, pour notre interlocuteur, «pour garantir la réussite du Plan national de prévention et de lutte contre les incendies de forêt, pour l’année 2024, la Direction générale de la Protection civile s’attelle, à lancer des campagnes de sensibilisation, qui s’étaleront sur une durée de plus de quatre mois. Ces campagnes insisteront sur le travail préventif sur le terrain, afin de sensibiliser les citoyens, aux dangers des feux de forêt et des récoltes, à travers toutes les wilayas».
Et afin d’assurer la réussite de ces campagnes de sensibilisation, le capitaine Nassim Bernaoui a mis l’accent, sur «l’importance de mobiliser toutes les franges de la société, et d’intensifier le travail de proximité, tout en veillant à exploiter les réseaux sociaux, à travers la diffusion de spots publicitaires sur la sensibilisation, aux dangers des incendies de forêt et des récoltes».
Plus précis, notre interlocuteur a ajouté à ce sujet, que «le plan prévoit aussi, un dispositif d’accompagnement mis en place par la DGPC chaque année, pour accompagner les agriculteurs durant la saison de la moisson, en sus des moyens d’intervention à préparer par l’agriculteur, pour protéger sa récolte, et la maintenance du matériel et des machines utilisés, durant la moisson».
En Algérie, les incendies de forêt sont classés parmi les risques majeurs
De son côté, le directeur général des Forêts (DGF), Djamel Touahria, a, de prime abord, affirmé qu’«en Algérie, les incendies de forêt sont classés parmi les risques majeurs, en vertu de la Loi 04-20 relative à la prévention des risques majeurs, et à la gestion des catastrophes, dans le cadre du développement durable. Les pertes sont, selon les années, plus ou moins conséquentes, même si des dédommagements sont prévus par le Gouvernement, tel qu’il a été le cas en 2020».
C’est pourquoi, selon notre interlocuteur, «le Plan national de prévention et de lutte contre les incendies de forêt sera prêt en temps voulu, avec de nouvelles mesures, qui viendront renforcer le dispositif déjà existant. Ce dispositif innovant, pour la détection précoce des incendies, sera opérationnel cette année, avec une éventualité de le généraliser l’année prochaine, à d’autres wilayas».
L’Algérie, en action pour renforcer ses défenses contre les incendies
Interrogé sur la préparation de ce dispositif, Djamel Touahria nous a répondu, que «la préparation suit son cours normal, et les moyens, humains et matériels, seront mobilisés. Pour les infrastructures ayant trait à cette opération, notamment l’ouverture et l’aménagement de pistes, l’ouverture et l’aménagement de tranchées pare-feux, la construction et l’aménagement de points d’eau, et la construction et l’aménagement de postes de vigie, elles sont en cours de réalisation, et nous comptons les réceptionner, avant l’ouverture de la campagne, soit le 1er juin 2024. Ces infrastructures viendront en renfort, au dispositif déjà mis en place».
Concernant le Plan national de prévention et de lutte contre les feux de forêt, notre interlocuteur a affirmé, que «les actions proactives s’articulent autour de quatre axes distincts. Il s’agit d’abord, de la sensibilisation, une activité qui se fait continuellement, pendant toute l’année, à commencer par les écoles, les prêches au niveau des mosquées, l’utilisation des médias (radio, télévision, spots publicitaires), l’aménagement d’espaces verts, au niveau des établissements scolaires, avec la participation des élèves…»
Et de poursuivre en évoquant, le lancement des travaux et l’accompagnement des riverains, à la forêt en affirmant que «ces derniers bénéficient des programmes de développement, sur budgets de l’Etat, notamment l’acquisition de ruches d’abeilles, de plantations fruitières, et l’utilisation de certains produits de la forêt, à titre gracieux sans porter préjudice à celle-ci».
Les feux de forêt, de 2021 et 2022, rappellent l’urgence d’une réponse opérationnelle massive
En outre, pour le directeur général des Forêts, «la réussite de la lutte contre les feux de forêt exige la mise en place, d’un système de veille efficace, qui lance l’alerte et définit, avec exactitude, les points d’intervention, afin de contenir l’incendie avant sa propagation».
«Le réchauffement climatique, avec des étés globalement plus chauds et plus secs, s’accompagne également, d’une augmentation du danger météorologique de feux de forêt, sur tout le territoire, notamment dans des zones qui étaient jusque-là, peu touchées», a-t-il ajouté. C’est pourquoi, selon notre interlocuteur, «les feux de forêt, de 2021 et 2022, rappellent l’urgence à s’organiser, afin d’apporter une réponse opérationnelle massive, dans les meilleurs délais. Car, les incendies de forêt engendrent un coût économique conséquent».
Vers l’acquisition de 6 avions bombardiers (canadairs) d’eau, de taille moyenne
Au sujet des avions bombardiers où canadairs, Djamel Touahria, a rappelé que «le président de la République a ordonné, le lancement d’un appel d’offres, pour l’acquisition de 6 avions bombardiers d’eau, de taille moyenne, pour lutter contre les feux de forêt, en renforcement de la flotte d’avions et d’hélicoptères existants».
«Les avions sont un moyen efficace contre les feux de forêt, qu’ils soient conçus spécialement à cet effet, ou transformés et adaptés. En fait, les avions sont très utiles, dans la lutte contre les incendies, comme appui tactique, des troupes au sol ou lorsque les conditions d’accès au feu, sont difficiles par voie terrestre», a-t-il ajouté.
Plus que cela, notre interlocuteur a affirmé, que «le Président a aussi ordonné au Gouvernement, d’utiliser les technologies de pointe, conçues localement, pour la surveillance des espaces forestiers, durant la saison estivale». «Prévoir, anticiper et planifier, pour ne pas être pris de court, c’est le défi à relever.
Dans ce contexte, il faut savoir, que dans la lutte contre les incendies, l’Agence spatiale algérienne (ASAL), joue un rôle clé avant, pendant et après la catastrophe, en fournissant des images aux organismes chargés de lutter contre les feux de forêt. La cartographie du risque d’incendies permet, de délimiter les zones potentielles d’éclosion des feux, tout en pouvant remonter aux causes et degré du risque, (végétation très inflammable, pente élevée, proximité d’une route)», a-t-il conclu.