Le documentaire «La rockeuse du désert» dresse le portrait de Hasna El Becharia, l’emblématique doyenne des femmes gnawas algériennes. A travers ce biopic musical, Sara Nacer, la cinéaste algéro-canadienne, nous livre un récit intime aux résonances venues du désert.
Primé au festival «Vues d’Afrique», édition 2022, le documentaire est le fruit d’une décennie de travail immersif dans l’univers de Hasna El Becharia, première adepte femme du gnawi, un genre musicale nord-africain à caractère ésotérique et confrérique des communautés d’origine subsahariennes, à faire évoluer le genre extra muros et à avoir manipuler le goumbri, un instrument réservé qu’aux hommes initiés. Hasna, par cette transgression, repousse les diktats exercés sur elle en tant que femme de la communauté gnawie.
Ce film documentaire, qui sera projeté le 31 mars en cours à Alger et le 3 avril prochain à Oran, est «un vibrant hommage à l’icône de la musique et du chant diwane au féminin que j’ai suivie pendant dix ans et dans lequel j’ai essayé de dépeindre une artiste dans sa vie, tant personnelle qu’artistique, sans cesse jalonnée d’épreuves difficiles», a indiqué Sara Nacer lors d’un entretien téléphonique avec l’APS en marge de son séjour en Algérie.
«Je suis très heureuse que les publics algérois et oranais puissent enfin découvrir ce film après sa projection aux rencontres cinématographiques de Béjaïa en septembre dernier et au festival Atri de Taghit (Béchar) en février 2023. J’espère que d’autres projections auront lieu dans d’autres villes du pays dans la perspective d’une meilleure connaissance du public de cette artiste de l’art diwane», a ajouté la réalisatrice.
«La rockeuse du déserté», d’une durée de 1 heure et 15 minutes, tourné et réalisé sur une période de presque dix ans, est un portrait intime et profond de Hasna El Bacharia, l’unique femme à jouer avec dextérité le goumbri, unique instrument à cordes de la musique et la danse diwane et qui a été par le passé réservé uniquement aux maâlmine (hommes), a-t-elle expliqué. «En étant l’unique femme-artiste a joué le goumbri, Hasna El Bacharia est la première musicienne qui a dépassé les barrières sociales des rituels tant sacrés que profanes de la culture diwane dans le pays», a-t-elle ajouté.
Ce long métrage a, depuis sa sortie en 2022, décroché plusieurs prix et récompenses internationales, notamment le prix du meilleur long métrage documentaire catégorie «Regards d’ici» au festival international Vues d’Afrique de Montréal (Canada) en 2022, le prix du meilleur long métrage documentaire au San Francisco Arab Film Festival en 2022 (Etats-Unis), le prix du meilleur film réalisé par une femme au Swedish International Film Festival (Suède) en plus du grand prix du jury du film-documentaire (Bantu du Jury) au Festival international de films africains et afro-descendants «Bangui, fait son Cinéma» (République centrafricaine). Il a également reçu la mention spéciale du jury au Ahmed Attia Award for the Dialogue of Cultures en 2022 (Espagne) lors du Euromed docs Market et Pitching forum, a été finaliste de la catégorie du meilleur long métrage au Social Impact Film and Art Festival de Montréal (Canada) en 2022 et, enfin, nominé pour The Public Award for the Best Film Directed by a Woman of Color à New York (Etats-Unis).
Au sujet de ses futurs projets cinématographiques, la jeune cinéaste algéro-canadienne a déclaré qu’elle sera dans la continuité de ce long-métrage, à savoir la poursuite de l’exploration du patrimoine culturel, matériel et immatériel algérien dans le but de le mettre en exergue et le promouvoir.