L’évocation du cinéaste Amar Laskri, décédé le 1er mai 2015, nous renvoie systématiquement à sa thématique des films à la gloire de la guerre de Libération nationale. Né le 22 janvier 1942 à Aïn Berda (Annaba), Amar Laskri, marqué par la guerre de Libération nationale, rejoint le maquis alors qu’il n’avait que quinze ans. Cet épisode douloureux de sa vie constituera plus tard sa thématique.
Laskri fera des études de théâtre, de télévision et de cinéma à Belgrade après l’indépendance de l’Algérie. Il débutera sa carrière de réalisateur avec trois courts-métrages, dont un épisode du film de fiction collectif L’Enfer à dix ans, produit par l’ONCIC en 1969.
Première expérience du genre en Algérie, le film L’Enfer à dix ans est composé de courts-métrages fiction, à savoir La Grive d’Abderrahmane Bouguermouh, «La Rencontre» de Sid Ali Mazif, La Mer de Ghaouti Bendedouche, Quand Janette… de Youcef Akika et Hier, des témoins d’Amar Laskri. Mais sa grande réalisation reste Patrouille à l’Est produit en 1971 par l’ONCIC.
C’est son film emblématique, un des chefs-d’œuvre du cinéma algérien, d’un réalisme déconcertant, un film en noir et blanc où nous retrouvons la belle lumière de Nasreddine Guenifi. Le film retrace l’histoire d’une patrouille de l’Armée de libération nationale chargée de convoyer vers la frontière tunisienne un militaire français prisonnier. Nous suivons ainsi les péripéties de ces moudjahidine en mission où l’esprit de bravoure et de sacrifice n’est jamais démenti. La patrouille accomplira sa mission et le prisonnier français sera remis à Tunis. Dans une remarquable séquence, nous voyons les moudjahidine en patrouille avançant en file indienne et, à côté, dans une autre vallée, des enfants jouant aux militaires avec des armes en bois, symbole de la relève. Laskri réalisera en 1978 El Moufid avec Rouiched et Abdelhalim Raïs. Ce film raconte l’histoire de deux journalistes partis pour réaliser un documentaire sur la vie d’un ancien moudjahid. En 1987, Amar Laskri tourne Les Portes du silence, un autre film consacré à la guerre de Libération nationale dans lequel il retrace le parcours d’un jeune sourd-muet à qui on refuse de monter au maquis à cause de son infirmité.
Le héros, Amar, se distinguera avec l’assassinat d’un officier de l’armée française. Vient ensuite le film Fleurs de lotus réalisé en 1998. Coproduction algéro-vietnamienne coréalisée par Amar Laskri et Trân Dac, il est question dans ce film d’un Algérien engagé dans l’armée française et qui se retrouve en Indochine.
Fleurs de Lotus sera le dernier film d’Amar Laskri qui, après avoir dirigé les destinées du CAAIC jusqu’à sa dissolution, restera un fervent défenseur du cinéma algérien. Ce qui l’amènera à présider l’association Lumière, qui veille à préserver la mémoire du cinéma algérien. Malade, Laskri luttera contre la mort et décèdera le 1er mai 2015 à l’âge de 73 ans.
Avec une vision artistique raffinée et une conception réaliste du cinéma, Amar Laskri, qui faisait partie de la génération des premiers cinéastes algériens, aura très vite compris la nécessité de pérenniser la Guerre de libération nationale et son héritage, mais aussi l’histoire coloniale, dans des bobines de 35 millimètres.
Disparu le 1er mai 2015, Amar Laskri avait souvent évoqué son dernier projet qui ne verra pas le jour, un film sur le parcours du militant anticolonialiste et psychiatre Frantz Fanon.
R. C.