L’Office national des aliments de bétail (ONAB) a annoncé une baisse des prix au niveau des unités relevant de ses groupes régionaux au niveau national.
«L’ONAB informe tous les éleveurs de la baisse des prix des aliments de bétail au niveau des 23 unités relevant de ses groupes régionaux à travers le territoire national (Est, Ouest et Centre)», est-il indiqué dans un communiqué.
Les prix des aliments de volaille destinée à la consommation sont établis à partir de 7.860 DA/quintal, ceux des aliments de volaille en phase de croissance à partir de 6.860 DA/quintal et ceux des aliments en fin de croissance à partir de 6.390 DA/quintal. Quant au prix des aliments de poules pondeuses, il est fixé à 5.340 DA/quintal, selon la même source.
Le prix des aliments d’engraissement des veaux est à partir de 5.250 DA/quintal alors que celui des vaches laitières sont établis à partir de 4.710 DA/quintal. Quant au prix d’engraissement des agneaux, il est fixé à partir de 3.280 DA/quintal.
Laâla Boukhalfa : «Si la mesure de l’ONAB sera encadrée on aura des résultats positifs»
L’expert agricole Laâla Boukhalfa a salué vivement cette décision prise par l’ONAB. Contacté par notre rédaction, l’expert a qualifié cette décision de «courageuse». Pour notre interlocuteur, «cette décision aura des résultats positifs sur le terrain et va contribuer à faire baisser les prix des viandes rouge et blanche si seulement l’ONAB encadre cette démarche pour avoir plus de résultats positifs sur le terrain». Selon Boukhalfa, «cette décision va dans un premier temps stabiliser les prix des viandes car la raison principale de leur cherté est l’aliment de bétail». «On peut croire qu’avec ces initiatives de renforcer l’offre locale en la matière, c’est non seulement les éleveurs qui vont en tirer profit, mais aussi les consommateurs qui pourront s’approvisionner en viande rouge et blanche à des prix abordables dès lors où la règle de l’offre et la demande est en leur faveur», a-t-il souligné.
Le spécialiste dresse tout d’abord un état des lieux de la filière viande blanche en estimant que les besoins nationaux sont de 650.000 tonnes par an. Selon lui, «les aliments représente environ 70% de la chaine de production, et si cette décision sera appliquée à l’échelle nationale il y aura des signes positifs et des quantités suffisantes sur le marché pour satisfaire la demande nationale à des prix raisonnables».
Le ministère de l’Agriculture accorde à l’ONAB d’importer plus de 30% des besoins du marché national
En outre, l’expert en agriculture nous a indiqué que «le ministère de l’Agriculture a octroyé un pourcentage très important pour l’importation de maïs et de soja à l’ONAB. Le ministère a accordé un montant très important à l’ONAB pour importer plus de 30% des besoins du marché nationale. C’est à partir de cette décision que l’ONAB a pris la décision de revoir ses prix en baisse».
Dans le même ordre d’idée, Laâla Boukhalfa a proposé de créer un réseau de coordination. «Il ne faut pas se limiter uniquement à la détermination des prix de vente, il faut une coordination avec la Fédération nationale de la filière avicole relevant de l’Union nationale des paysans algériens (UNPA) pour essayer de faciliter la tâche aux éleveurs pour l’accès à ce type d’aliments», a-t-il indiqué. Il a également révélé que «la décision concernant la révision des prix des aliments de bétail sera généralisée à l’échelle nationale pas uniquement au niveau de l’ONAB».
Concernant la filière avicole, Boukhalfa nous a fait savoir que «l’Algérie est considérée par les pays les plus développés en amont à l’échelle africaine car disposant de deux centres de grands-parentaux (cheptel de mâles et femelles des poussins d’un jour, ndlr) implantés à Tlemcen et à Aïn Oussara (Djelfa). Ces deux centres contribuent à la couverture de 40% de la demande nationale en la matière». «Nous pourrons même produire jusqu’à 1 million de tonnes par an au lieu des 650.000 tonnes actuellement», a- t-il ajouté. Néanmoins, «les craintes des éleveurs s’érigent en frein, tant ils essaient de plafonner leur production de poussins en fonction de la demande et de la marge bénéficiaire assurée. Surtout que le poulet vivant nécessite une commercialisation dans de courts délais».
La régularisation des prix des viandes blanches nécessite de construire de nouveaux abattoirs
Par ailleurs, Boukhalfa a fait état d’un dysfonctionnement à l’aval de cette filière dû essentiellement au nombre insuffisant d’abattoirs industriels publics et privés, estimé, a-t-il précisé, «à 16 complexes censés couvrir seulement 20% de la production nationale, alors que le reste passe par le canal informel». «Pour l’abattage clandestin, qui n’est pas soumis au contrôle sanitaire, il y a un risque sur la santé humaine», a-t-il fait remarquer. Ainsi, «une régulation des viandes blanches nécessite d’équilibrer l’amont et l’aval de la filière en construisant de nouveaux abattoirs, des centres de stockage et des unités de froid à même de couvrir la demande nationale et se projeter dans l’exportation».
L’autre problématique de taille est l’aliment de bétail, raison principale de la cherté des viandes. «La formule américaine basée sur l’incorporation de 70% de maïs et 30% de tourteaux de soja nous coûte cher. Car les prix de ces deux matières premières importées ont flambé à l’international ces trois dernières années, d’où l’impossibilité de maîtriser les prix localement», a-t-il relevé. Et d’ajouter : «Le maïs est passé de 2.500 à 6.000 DA le quintal». Quant aux tourteaux de soja, leur prix a franchi le seuil de 12.000 DA le quintal au lieu de 6.000 dinars. Le quintal d’aliment, qui coûtait 4.500 DA est cédé actuellement à 9.000 DA. En guise de panacée à cette hausse des prix, l’expert préconise de revoir la composition de l’aliment en y incorporant des matières premières produites localement, citant le carroube, l’orge, le triticale ainsi que les grignons d’olive, les fèveroles, l’azolla et la luzerne asséchée. «Nous pouvons développer notre propre formule sachant que le coût de production de ces matières est presque insignifiant et le besoin nutritif d’un poulet de chair est de 2.800 kilocalories/jour», appuie-t-il.
«L’autre solution pour la stabilité des prix des viandes réside dans l’intervention de l’Etat pour subventionner l’aliment de bétail à hauteur de 50%», a-t-il souligné. Pour ce qui est des viandes rouges, notre interlocuteur rappelle que «la filière est, à son tour, tributaire de l’aliment de bétail». Ainsi, il suggère de «réhabiliter les zones agropastorales, outre les solutions précitées».
Selon lui, «cette procédure doit être accompagnée d’autres mesures représentées dans la manière de développer et de soutenir la culture fourragère en Algérie, similaire au soja et au maïs, et la plupart des composants de ces aliments qui sont consommés par la volaille», appelant à la nécessité de «trouver d’autres alternatives aux composés de l’industrie de l’alimentation animale en supprimant les composés coûteux tels que le soja et le maïs et en s’orientant vers les résidus de caroube».
Haroun Omar : «Les prix de la viande blanche vont baisser de 20%»
Le docteur et économiste Haroun Omar nous a révélé que «la décision de l’Office national des aliments de bétail de baisser les prix au niveau des relevant de ses groupes régionaux au niveau national est un pas positif et entraîne une baisse des prix des aliments et des coûts pour les agriculteurs ; cela conduira nécessairement à une baisse des prix des matières premières, notamment ceux liées à la viande blanche car étant directement concernés par la décision». L’expert a laissé entendre que «les prix de la viande blanche baisseront de l’ordre de 20 %». Il a appelé dans le même contexte à «la nécessité de prévoir davantage de mécanismes pour les contrôler, tout cela par l’encouragement et l’augmentation du nombre d’éleveurs».
Pour notre interlocuteur, la véritable raison de la hausse des prix des viandes, en particulier la viande blanche, revient à «la baisse du nombre d’aviculteurs car ils ont subi des pertes dans les étapes précédentes». Haroun a ajouté que «la plupart d’entre eux ne sont pas des agriculteurs, mais pratiquent plutôt l’agriculture comme deuxième profession».