De Tlemcen à Tébessa, et de Tizi Ouzou à Tamanrasset, les Algériens s’apprêtent à célébrer, dans le faste et la joie, la fête de «Yennayer», qui a pour symbolique ancestrale le premier jour de l’an du calendrier agraire et qui perpétue une civilisation et une identité millénaires, dotées d’un savoir inestimable.
Cette fête, qui prend racine dans les profondeurs de l’histoire, dénote, s’il en est, que l’Algérie, plusieurs fois millénaire, accorde une importance sans commune mesure à son authenticité, son histoire et à sa diversité culturelle.
Dans tout le territoire national, d’Est en Ouest et du Nord au Sud, l’Algérie vivra ce jeudi, qui coïncide avec la date du 12 janvier, au rythme de festivités en tous genres : cérémonies officielles, expositions, étalage de l’art culinaire et vestimentaire local…
Les familles ne rateront pas ce rendez-vous, dont l’appellation diffère aussi selon les régions. Ainsi, Yennayer est sorti de l’intimité familiale, du nécessaire regroupement autour de l’aïeul, pour conquérir l’espace public grâce à la décision des pouvoirs publics de décréter la journée fête nationale, et surtout chômée et payée. Enfin, au-delà des festivités de réjouissances et de célébrations, l’objectif de cette halte, dont les Algériens dans leur ensemble sont fiers, est toujours le même : le présage d’une nouvelle année féconde et une volonté de pérenniser les vertus du vivre-ensemble.
La vallée du M’zab, Ghardaïa, abritera les festivités officielles
Alors que la ville de Tamanrasset avait abrité, l’an dernier, les cérémonies officielles de Yennayer 2972, cette année c’est au tour de la vallée du M’zab, Ghardaïa, d’avoir l’honneur d’abriter l’édition de cette année (2973), et également la cérémonie de la remise du prix du président de la République pour la littérature et la langue amazighes dans sa troisième édition.
Selon le Secrétaire général du Haut commissariat à l’amazighité (HCA), Si El Hachemi Assad, «l’Algérie célèbre officiellement cet événement de haute portée, depuis 2018, à travers un programme culturel et scientifique mettant en avant la tradition et la profondeur historique de cette fête ancestrale».
La même source a également poursuivi en indiquant que «des démonstrations folkloriques et artistiques de rue, expositions, mettant en avant le patrimoine et le savoir-faire locaux, et des conférences sur la culture amazighe dans les manuscrits, figurent au programme de ces festivités officielles de Yennayer 2973, placées sous le signe le thème ‘‘Yennayer nous rassemble dans une Algérie unie et unifiée’’».
Rappelant la profondeur historique de Yennayer, le SG du HCA a salué «l’intérêt sincère et franc accordé par les autorités à l’amazighité comme élément identitaire, historique et authentique» qui s’inscrit dans «un projet civilisationnel et traduit l’enracinement de la culture algérienne», selon le SG du HCA.
Cette volonté, a-t-il dit, se traduit par les efforts de «toutes les institutions de l’Etat qui contribuent, chacune de son côté, à la promotion et au renforcement du sentiment d’appartenance à l’Algérie».
Evoquant le prix du président de la République pour la littérature et la langue amazighes, Assad a fait savoir que «cette haute distinction a suscité cette année un grand engouement des auteurs et universitaires, avec la publication record de 132 ouvrages littéraires». «C’est une haute distinction qui vise à encourager et à soutenir les auteurs, hommes de Lettres et chercheurs qui œuvrent pour l’épanouissement de la langue amazighe», s’est-il félicité.
Projection de films, expositions, allégresse et savoir-faire local
Concernant le volet des festivités concocté à l’occasion de Yennayer 2973, il est important de savoir que le programme prévu pour cette occasion porte sur la projection de films, la présentation de pièces de théâtre et l’organisation d’expositions de métiers et d’artisanat et de conférences autour de la culture et de la langue amazighes.
Dans ce cadre, l’Agence algérienne pour le rayonnement culturel (AARC) organisera, du 12 au 17 janvier à Dar Abdeltif, une exposition de l’artiste plasticien, Aghilès Issiakhem.
L’Office Riadh El Feth a également programmé, à l’occasion, une rencontre avec l’artiste Hasna Henni, en compagnie de la troupe «El Khallat» de la ville de Tizi Ouzou, en sus de la participation de la conteuse Sihem Kennouche et de la projection d’un film amazigh Tableaux folkloriques du patrimoine local, du réalisateur Ahmed Guenif.
De son côté, le Théâtre national algérien (TNA) organisera également «la 2e édition des Journées nationales du théâtre amazigh» du 9 au 15 janvier.
Le palais de la Culture Moufdi Zakaria accueillera une exposition de produits artisanaux en collaboration avec la Direction de la culture de Tissemsilt.
De plus, l’Office national de la culture et de l’information (ONCI) a programmé à la salle Atlas une représentation théâtrale intitulée Yennayer et la vieille folle, du réalisateur Miloud Hadj Saïd.
Ce programme a débuté samedi après-midi au niveau de la place El Kettani de Bab El-Oued, à travers une exposition de produits artisanaux, qui se poursuivra jusqu’au 31 janvier au Centre culturel Mustapha Kateb.
Les galeries Mohamed Racim et Mohamed Temmam accueilleront, quant à elles, des expositions d’arts plastiques jusqu’au 15 janvier.
Par ailleurs, la Cinémathèque d’Alger a inscrit dans son programme la projection de films en tamazight, dont Leila et les autres de Sidali Mazif, Fadhma N’Soumer et Machaho de Belkacem Hadjadj, Juba II de Mokrane Aït Saâda, La Montagne de Baya de Azzedine Meddour, La Maison Jaune de Amor Hakkar et Mimezrane de Ali Mouzaoui.
A noter que la capitale du M’zab, Ghardaïa, abritera, les 11 et 12 janvier, les festivités officielles marquant la célébration de Yennayer 2973.
Plats traditionnels et friandises dans la joie et l’allégresse
Pour célébrer cette fête nationale à travers le pays, les familles algériennes se réunissent pour se souhaiter leurs vœux annuels et partager ensemble un bon repas traditionnel avec des recettes ancestrales issues du patrimoine, telq des plats souvent à base de couscous ou de semoule intégrant les légumes secs en tous genres.
En ce jour, les mets cuisinés doivent être riches et copieux afin de symboliser et présager l’abondance pour toute la nouvelle année à venir qui démarre. Les enfants sont gâtés avec de délicieuses friandises et revêtus de leur plus bel habit acheté pour l’occasion.
C’est pourquoi les marchés se mettent aux couleurs de Yennayer. Sur des étalages, formels et informels, des friandises et confiseries en abondance et de toutes les couleurs sont proposés. Un air de fête prédomine au niveau des marchés, où les commerçants proposent toutes sortes de friandises, bonbons, chocolats, dragées et fruits secs, ainsi que des mélanges de confiseries spéciales Yennayer.
On entend partout les vendeurs inviter les passants à célébrer le Nouvel An berbère en leur proposant toutes sortes de friandises. Des douceurs, comme les mélanges de bonbons, chocolats et fruits secs sont proposées à la criée, à la grande joie des clients séduits par la vue de ces friandises, qui s’arrêtent pour en choisir quelques variétés.
Dans le rayon des fruits et légumes, on note une légère hausse dans les prix. Ceux de la volaille, en particulier en raison de la forte demande. En réalité, au vu de l’immensité de l’Algérie, le cérémonial varie selon les goûts et l’appartenance régionale des familles qui, soucieuses de perpétuer la transmission, y souscrivent avec plaisir.
Contrairement au reste de l’année, chacun doit manger à satiété pour présager d’une année fertile, tout en veillant sur le principe de solidarité.