Sous le thème «Les sols, à l’origine des aliments», la Journée mondiale des sols sera célébrée ce lundi en Algérie. Un pays qui croit en l’apport de l’alimentation au bien-être du citoyen et qui s’attelle à atteindre sa sécurité alimentaire, synonyme de sécurité intérieure face aux défis de l’heure.
C’est pourquoi, cette journée qui coïncide chaque année avec la date du 5 décembre, vise à sensibiliser à l’importance de maintenir des écosystèmes sains et le bien-être humain en abordant les défis croissants de la gestion des sols, en luttant contre la perte d’éléments nutritifs et en encourageant les sociétés à améliorer la santé des sols.
En premier, il faut savoir que le sol est un monde composé d’organismes, de minéraux et de composants organiques qui fournit de la nourriture aux humains et aux animaux en permettant aux plantes de pousser.
Raison pour laquelle les sols ont besoin d’un apport équilibré et varié de nutriments en quantités appropriées pour être en bonne santé. Selon des spécialistes de la question, les systèmes agricoles perdent des nutriments à chaque récolte et si les sols ne sont pas gérés de manière durable, la fertilité se perd progressivement et les sols produiront des plantes faibles en nutriments.
A l’opposé, certains sols dégradés sont tellement appauvris en nutriments qu’ils perdent leurs capacités à nourrir la vie, tandis que d’autres ont une concentration en nutriments tellement élevée qu’ils en deviennent toxiques pour les plantes et les animaux, polluant l’environnement et provoquant le changement climatique.
«Le sol est une ressource fondamentale et un élément essentiel pour l’agriculture»
Pour l’expert agronome Akli Moussouni, qui passe pour être une voix écoutée en matière de production agricole, «le sol est une ressource fondamentale et un élément essentiel de l’environnement naturel, dont la plupart des aliments de la planète dépendent. Le sol offre à l’homme son espace vital, ainsi que les services liés aux écosystèmes essentiels, importants pour la régulation et l’approvisionnement de l’eau, la régulation du climat, la conservation de la biodiversité, la fixation du carbone et les services culturels», ajoutant : «Pour le cas de l’Algérie, bien qu’elle a été classée par le Programme alimentaire mondial (PAM) des Nations unies comme le premier pays en Afrique en matière de sécurité alimentaire, les caractéristiques de son climat influent sur la productivité et la diversité agricole.
C’est connu, l’Algérie est un pays sec qui appartient au triangle aride-semi-aride.» «Ses vastes espaces intérieurs sont caractérisés par un climat sec et froid en hiver, et chaud et sec en été. Les conditions climatiques qui exercent une influence très forte dans la croissance agricole sont caractérisées par une pluviométrie déficitaire et irrégulièrement répartie. Elles font obstacle à l’adoption de pratiques intensives d’agriculture sans irrigation artificielle», selon lui.
«Il importe de sensibiliser dès aujourd’hui à l’importance des sols»
A la question de connaître l’importance des sols et leur utilisation de façon durable, l’expert a indiqué : «Bien que l’importance des sols semble évidente, dans le passé, ils n’ont pas reçu l’attention nécessaire en termes d’utilisation et de gestion. Les sols ont en effet été souvent considérés comme une ressource infinie qui serait toujours en mesure de nous fournir ses services. Nous savons aujourd’hui qu’il n’en est rien. Il importe de sensibiliser dès aujourd’hui à l’importance des sols, en particulier à la nécessité de les protéger et de les utiliser de façon durable».
Avant de conclure, Akli Moussouni a tenu à souligner le cas des eaux salines et ses répercussions sur l’état des sols : «En Algérie, la zone aride représente près de 95% du territoire national, dont 80% dans le domaine hyper aride. Dans ces zones, l’eau est le principal facteur limitant la production agricole. Et la présence des sels solubles dans l’eau d’irrigation et le pouvoir évaporateur de l’air dans les zones irriguées conduisent souvent à la salinisation des sols». «Les cultures sur un sol salin subissent un stress osmotique élevé qui engendre des troubles nutritionnels, des toxicités, des conditions physiques médiocres et une productivité réduite qui peuvent, à terme, transformer des champs fertiles en déserts», dit-il.
Abondant dans le même sens, l’autre l’expert agronome, Khaled Aïssaoui, n’est pas allé avec le dos de la cuillère pour indiquer à ce sujet : «La santé de la plante commence par le sol. Quand les agriculteurs mettent en place des pratiques de rétablissement ou d’équilibre biologique dans le sol, comme des couverts végétaux, une rotation culturale ou des fertilisants naturels, cela améliore les interactions entre le sol et la plante. Ces pratiques peuvent aider à diminuer la réponse négative d’une plante à un stress environnemental et également augmenter la productivité», fait-il remarquer avant d’aborder la question de la sécurité alimentaire qui ne peut, selon lui, «être réalisée qu’avec un sol bien entretenu».
C’est pourquoi, selon interlocuteur, «une bonne gestion de la microbiologie redonne vie au sol et permet d’augmenter la disponibilité des nutriments qu’une plante peut utiliser pour améliorer sa croissance racinaire et probablement son immunité et l’élimination des maladies.»
«Notre nourriture vient du sol»
De plus, pour l’expert agronome Khaled Aïssaoui, «la biodiversité des sols joue un rôle indirect sur la qualité et l’abondance des cultures, car elle contribue au renouvellement de la structure du sol, décompose les matières organiques et facilite l’assimilation de nutriments minéraux disponibles pour les plantes».
S’étalant sur l’importance d’un sol bien entretenu sur la qualité de la production, notre interlocuteur a tenu à souligner que «notre nourriture vient du sol. Composé de minéraux, d’eau, d’air et de matières organiques, le sol produit le cycle de macronutriments de la vie végétale et animale et est la base même de l’alimentation animale, des carburants, des fibres et des produits médicaux, ainsi que de nombreux services écosystémiques essentiels», ajoutant : «La qualité de notre nourriture dépend pour beaucoup de la qualité de notre sol. La dégradation du sol est un processus silencieux, pourtant elle a d’énormes conséquences pour l’humanité. Des études montrent qu’environ un tiers des sols de la planète connaissent une dégradation modérée à sévère. Avec l’Année internationale des sols, 2022 se trouve être une année particulièrement importante pour l’avenir durable de la planète, avec de nouveaux objectifs mondiaux en passe d’être annoncés.» Et d’attirer l’attention sur le danger de la dégradation des sols en indiquant : «Le sol est une ressource naturelle non renouvelable ; sa perte n’est pas récupérable au cours d’une vie humaine. Il faut parfois des centaines, voire des milliers d’années pour former un centimètre de sol à partir de la roche-mère, mais ce centimètre de sol peut se perdre en l’espace d’une seule année avec l’érosion».
«La sécurité alimentaire ne peut avoir lieu sans un sol adéquat»
C’est ainsi que de fil en aiguille, l’expert agronome est arrivé à faire le lien entre un sol bien irrigué et la sécurité alimentaire en indiquant : «Nous avons une sécurité alimentaire garantie grâce à l’importation et au secteur agricole qui s’est montré performant sur beaucoup de filières, notamment les fruits et légumes et les viandes blanches. Le grand défi est que ce modèle qui a tant fonctionné jusque-là peut ne pas l’être dans le futur en raison des menaces liées à la dégradation des sols due, entre autres, au changement climatique et, par ricochet, une fluctuation des prix sur le marché mondial».