Hormis la dimension festive et spirituelle de la célébration de l’Aïd El-Adha, c’est également l’occasion d’inculquer à la société la culture de la récupération des peaux de mouton. L’opération de collecte, prévue cette année à travers l’ensemble des wilayas du pays, constitue une action à dimension économique et écologique.
A cet effet, une vaste campagne nationale de collecte des peaux de moutons sacrifiés sera lancée, dès cette semaine, selon un communiqué du ministère de l’Industrie qui précise, par ailleurs que «des SMS ont été ainsi envoyés aux citoyens, via les trois opérateurs, pour les inviter à s’assurer de bien écorcher la peau, d’y mettre du sel immédiatement après cette phase et de déposer le cuir au niveau du site désigné comme point de collecte dans leur quartier».
Il est tout à fait clair que sans l’adhésion du citoyen, cette opération serait vouée à l’échec tant il était loisible de voir des centaines de peaux de mouton s’entasser dans les décharges publiques alors que celles-ci constituent, pour les industries, un bouffée d’oxygène tant pour le cuir que pour la laine.
Il faut savoir que cette année, l’opération de collecte de peaux de mouton sera menée en coordination avec tous les acteurs et intervenants, instances et associations professionnelles activant dans la filière tannerie ainsi que la société civile.
Des retombées positives sur la sphère économique et environnementale
Aussi, ayant pour slogan «Richesse précieuse et exploitation idoine pour la diversification économique», cette opération vise principalement à renforcer l’interaction entre les secteurs public et privé, à exploiter le potentiel de la richesse animalière et à promouvoir les industries du cuir. Une opération qui, faut-il le rappeler, s’inscrit dans la continuité de celles menées depuis 2018 et qui ont connu une pause, au cours des années 2020 et 2021, en raison de la pandémie de Covid-19.
Et pour une réussite totale de cette opération de collecte de peaux de mouton, les walis auront à chapeauter cette opération génératrice de richesse en facilitant les opérations de collecte et de transport des peaux des moutons sacrifiés sur les sites désignés a cet effet. Une fois déposées, les filiales du secteur de l’industrie auront à recevoir et exploiter le cuir collecté localement en s’engagement à contribuer à fournir des espaces de stockage au niveau des entreprises économiques publiques.
Un travail qui vient appuyer la politique gouvernementale visant la relance économique puisque, selon les données fournies, «le volume de traitement annuel des peaux bovins est de plus de 34 000 tonnes, avec un taux d’utilisation des capacités de 71% alors que le volume de traitement annuel des peaux d’ovins s’élève à près de 4 millions de pièces, avec un taux d’utilisation des capacités de l’ordre de 60%».
200 000 peaux de mouton ont été récupérées en 2021
Contactée par nos soins, une source du ministère de l’Industrie qui a souhaité garder l’anonymat nous a confié que l’opération de collecte pour cette année a débuté dans l’ensemble des wilayas du pays et que le bilan de cette opération ne sera connu qu’à son issue, avec la précision que l’année dernière, «entre 180 et 200 000 peaux de mouton récupérables ont pu être rassemblées pour être dirigées vers les structure de transformation relevant du secteur industriel». Et si pour cette année, il faudra patienter que l’opération prenne fin, notre interlocutrice table sur «un taux beaucoup plus élevé», a-t-on appris.
Une perte sèche de près de 5 millions de dollars pour l’économie nationale
Pour l’expert en économie Kamel Kheffache, «cette aubaine pour l’industrie du cuir est à saisir au plus vite au vu de ses retombées, non seulement sur la sphère économique, mais également environnementale», nous a-t-il affirmé d’emblée. Or, tout en saluant vivement la décision du ministère de l’industrie de mettre le paquet pour sensibiliser le citoyen à l’idée d’adhérer à cette opération, il regrette par ailleurs que «des millions de peaux d’ovins et de bovins sont jetés sur les lieux du sacrifice puis retrouvées au niveau des décharges publiques». «C’est un manque à gagner considérable pour l’économie nationale», soutient Kheffache, qui précise par ailleurs, à ce sujet, que «l’économie algérienne perdrait à chaque occasion de la fête de l’Aïd El-Adha, près de 5 millions de dollars (60 milliards de centimes) en se débarrassant des peaux et laines des animaux sacrifiés durant cette fête, et ce, en plus des centaines de milliers de dollars perdus tout au long de l’année, en dépit des campagnes de sensibilisation».
Pour notre interlocuteur, qui considère que cette aubaine pour l’industrie du cuir, dont une bonne partie est importée, doit figurer comme priorité en cette circonstance de sacrifice de l’Aïd El-Adha, «les pouvoirs publics ont la responsabilité d’organiser cette opération, en impliquant les autorités locales et en organisant la collecte des peaux, en allouant des lieux techniques pour les collecter et en créant des institutions pour l’activité dans ce secteur», tout en soulignant qu’«il s’agit d’une matière première commercialisable à l’étranger et rentable».
70% des peaux récupérées peuvent être exportées
Concernant les peaux qui proviennent des bêtes sacrifiées à l’occasion de l’Aïd, «70% de ces peaux peuvent être exportées vers des pays méditerranéens comme le Portugal, l’Italie, qui sont les pays européens les plus importants dans l’industrie du cuir», a-t-il fait savoir, tout en indiquant que «près de 4 millions de moutons sont sacrifiés chaque année pendant cette fête religieuse».
Et pour coordonner cette opération de collecte de peaux de mouton – une véritable bouffée d’oxygène pour les tanneries à travers le pays – et en tirer un maximum de profit, Kamel Kheffache suggère une implication du citoyen auquel on pourrait accorder une rétribution pour chaque toison remise aux endroits de réception de ces peaux.
Le cuir, en produit semi-fini, figure parmi les produits exportés par le pays
Et c’est pourquoi, eu égard à son importance stratégique, que cette campagne de collecte de peaux d’ovins et de bovins de l’Aïd a été lancée par le ministère de l’Industrie et des Mines. Cette initiative a pour principal objectif de répondre à un besoin en matière première pour les entreprises de la filière cuir, dont les produits sont destinés essentiellement à l’exportation.
Le ministère table sur une vaste campagne de communication et de sensibilisation pour réussir cette opération-pilote qui permettra aux opérateurs du secteur du cuir de respirer un tant soit peu. Car, faut-il le signaler, le cuir, en produit semi-fini, figure parmi les produits exportés par le pays.
Hormis le cuir, il faut savoir que la laine est également une source non négligeable pour l’économie du textile. En effet, au chapitre du traitement de la laine, le volume annuel affiche plus de 10 000 tonnes avec un taux d’utilisation des capacités de 77%. De plus, les capacités annuelles de traitement installées pour cette matière sont de plus de 13 000 tonnes avec un taux d’utilisation des capacités de l’ordre 78%.