L’artisanat serait-il encore le parent pauvre de l’activité culturelle ? Des actions, il est vrai n’ont jamais manqué pour redorer le blason à ce secteur qui pourtant a tant donné et continue de donner. Un savoir-faire séculaire dans la majeure des travaux toujours manuels qui souffre de la promotion adéquate à même de lui offrir la place qui lui sied.
Poterie, bijouterie, vannerie, dinanderie, ébénisterie, tissage, des activités qui malgré le temps qui passe, le manque de moyens, de relève souvent, poursuit son bonhomme de chemin cahin caha, car il est parfois la source de subsistance des familles ou tout simplement l’expression d’une passion qui refuse de s’éteindre. Sur tout le territoire national, ces ouvrages d’art réalisés par aussi bien les hommes que les femmes, essaiment les boutiques de souvenirs, ornent les vitrines des magasins d’artisanat, habillent les espaces d’expositions des halls d’hôtels, même les lieux de restauration en décorent leur salle, brigués partout comme des trophées sans en brandit la valeur. Même marchande. Car chacun des préposés à la vente de ces articles faits mains y va de ses tarifs. Hors de prix. Même sa promotion ne reflète point ses sacrifices, étant un travail de longue haleine, supporté par les matières premières rares et chères, le physique à l’épreuve des efforts fournis par les yeux, les mouvements, les ports, les muscles, l’âge… Des hommes et des femmes aident à construire depuis la nuit des temps un artisanat à l’épreuve du temps et de l’indifférence. Même les événements qui lui sont consacrés n’arrivent pas à le faire décoller. On s’extasie devant la poterie tunisienne, le tapis du Maroc et d’autres pays ne serait-ce que ceux qui nous sont limitrophes, en ignorant ouvertement ce qui est fait chez nous, avec dextérité, pluralité du signe, du symbole, de la couleur et de la diversité culturelle. Rien ne vient supplanter ces travaux qui en l’absence d’une véritable politique de l’artisanat, voit son écoulement à des prix hors de portée. Le facteur essentiel, qui fait fuir l’algérien de ces œuvres qui sont méconnues, d’abord, ensuite mal accompagnées. Et prétendre à l’exporter est une autre paire de manches. Savoir faire mis sous le boisseau alors qu’il devrait briller sur les scènes, tant nationale qu’internationale.
La semaine dernière, à la maison de la culture Mouloud Mammeri a tenté de cerner la problématique autour d’un salon du savoir faire. L’artisanat est un secteur qui a été toujours adjoint à celui de la culture. Il est aussi dans cette complémentarité qui n’est pas suffisamment prise en charge pour venir en aide à ces artisans qui ne peuvent vivre de leur travail, eux qui sont vecteur de l’identité culturelle et pourvoyeur économique potentiellement porteur.
Une présence de plus en plus timide ou noyée dans ces produits venus de chez nos voisins à des prix compétitifs qui relèguent ainsi nos articles en seconde place. Une place que l’artisanat national dans toutes ses déclinaisons tente vainement d’acquérir en se présentant sur les places publiques, via des acheminements presque clandestins ou privatifs. Telles ces tisseuses de Timimoun qu’un groupe de femmes installées dans la capitale font travailler en proposant leurs réalisations avec commandes pour les aider à survivre de leur métier. Ce que les pouvoirs publics n’ont pas pensé faire. Il y a aussi ces expositions-vente sur les routes nationales, l’été venant, opportunité pour écouler leurs marchandises. Il y a eu le terrorisme, puis aujourd’hui la covid-19, qui empêchent ces promotions locales, au vu de la restriction des déplacements des touristes nationaux la saison estivale écoulée, et les confinements inter wilaya dont ont fait objet les automobilistes.
Une perte plus que sensible qui n’est pas prête d’être récupérée en ces temps difficiles de crise sanitaire qui freine toute activité économique. Une action majeure envers ces artisans qui aiderait à contribuer à la survie de métiers séculaires, authentiquement culturels et identitaires, à même de se frayer une bonne place dans l’universalisme, en valeur marchande qui lui revient.