Le roi du Maroc, Mohammed VI, a prononcé, samedi, un discours dans lequel il est revenu sur les relations avec l’Algérie. L’apparition de Mohammed VI intervient après l’intensification d’une guerre acharnée dans les couloirs du palais royal, suite à la détérioration de son état de santé.
Ce qu’a dit Mohammed VI sur les relations avec l’Algérie ne sortait pas de la logique de ses précédents discours mielleux. «Il y a des parties qui veulent semer la fitna entre les peuples marocain et algérien, et nous ne le permettrons pas», a-t-il déclaré dans son discours. Et comme toujours, Mohammed VI n’a pas manqué l’occasion d’évoquer la question des frontières en indiquant : «Nous espérons de la Présidence algérienne que le Maroc et l’Algérie se mettent la main dans la main pour que les deux pays établissent des relations normales entre deux peuples frères, unis par des liens humains et un destin commun. Nous voulons que les frontières entre le Maroc et l’Algérie soient des ponts qui portent un avenir commun. Nous voulons que le Maroc et l’Algérie soient un exemple pour les autres peuples.» Lors du même discours, le roi du Maroc a évoqué un complot visant, selon lui, à déstabiliser les relations entre Alger et Rabat, en accusant indirectement la main étrangère.
«Les allégations selon lesquelles les Marocains insultent l’Algérie et les Algériens sont l’œuvre d’individus irresponsables qui se donnent beaucoup de mal pour semer la discorde entre les deux peuples frères», a-t-il estimé.
«Ces calomnies sur les relations maroco-algériennes sont totalement insensées et sincèrement révoltantes. En ce qui nous concerne, nous n’avons jamais permis et nous ne permettrons jamais à quiconque de porter atteinte à nos frères et voisins», a ajouté Mohammed V.
Mizab : «Le Maroc veut normaliser ses relations avec l’Algérie»
Du point de vue de l’expert en questions géopolitiques, Ahmed Mizab, d’une manière générale, «les déclarations du roi du Maroc dans son discours lors de la fête du trône n’ont plus aucune crédibilité, car elles sont souvent précédées ou suivies d’un coup de poignard dans le dos, dont peut-être les plus importantes sont les déclarations du ministre de l’entité sioniste, dans lesquelles il a menacé l’Algérie depuis les terres marocaines».
Dans sa déclaration accordée à notre rédaction, Mizab nous a affirmé que «le discours du monarque marocain ne peut être lu par bonne volonté en raison d’un certain nombre de considérations objectives».
Dans le même sillage, l’expert a évoqué quatre points essentiels. Premièrement, c’est qu’entre le discours et l’action il y a un ensemble de contradictions. Dans le sens où la politique hostile du Maroc envers l’Algérie et les campagnes médiatiques systématiques et claires ne donnent pas l’image que Mohammed VI essaie de nous vendre. Deuxièmement, ce que Mohammed VI a dit ce ne sont que des expressions de marketing politique sans démarches pratiques ni prises d’engagement dans ce contexte, ce qui se reflète dans le rapprochement entre le régime marocain et l’entité sioniste à tous les niveaux, en particulier sécuritaires. Troisièmement, ce discours vise à trouver des moyens de sortir d’une crise interne qui peut se transformer en une crise complexe.
Quatrièmement, il y a une prise de conscience du Maroc que la fermeté avec laquelle la diplomatie algérienne a agi est sans précédent et que «l’Algérie aujourd’hui ne négligera pas les erreurs que le Maroc a commises contre l’histoire et contre toute la région».
Par conséquent, pour Mizab, «le discours manque d’éléments d’action et la présentation des mécanismes par lesquels la chaleur des relations bilatérales peut être restaurée et les engagements de fond à prendre».
Répondant à une question sur une éventuelle reprise des relations entre les deux pays, l’expert nous a affirmé que «les positions de l’Algérie sont claires et ont été exprimées plus d’une fois par le président de la République et confirmées par le ministre des Affaires étrangères, à savoir que la relation entre le peuple algérien et le peuple marocain est une relation historique et fraternelle, mais le problème est posé au niveau du système marocain, qui ne fait pas preuve de bonne volonté et ne recherche pas le principe de bon voisinage», ajoutant que «la restauration des relations s’accompagne de termes et d’obligations, tout comme la réouverture des frontières».
Le roi du Maroc Mohammed VI a réitéré, «une fois de plus», sa main tendue à l’Algérie, malgré la rupture des relations entre les deux voisins maghrébins, lors du discours traditionnel marquant l’anniversaire de son accession au trône. Sur ce point, Mizab nous dira que «le Makhzen tente toujours de nous vendre la politique de la main tendue sans prendre de mesures concrètes dans ce contexte». En conséquence, «la position de l’Algérie est claire : il y a des conditions et des obligations que le Maroc doit mettre en œuvre par des mesures pratiques», a-t-il souligné.
Benameur Bendjana : «Le Maroc doit changer sa politique extérieure avec l’Algérie»
Pour sa part, l’expert en sécurité internationale, Benameur Bendjana nous a indiqué qu’ «il y a des problèmes géopolitiques entre les deux pays et géostratégiques plus importants». Pour notre interlocuteur «ce n’est pas une déclaration qui va effacer tout ce qui s’est passé entre les deux pays».
Nous avons deux problèmes qui existent entre l’Algérie et le Maroc, le premier c’est le Sahara occidental, expliquant que «c’est un problème qui relève des Nations unies». Le deuxième ajoute l’expert «c’est la souveraineté nationale, le Maroc nous a accusés de terrorisme et il nous doit des excuses et il doit le faire».
Dans le même contexte, Bendjana a également souligné qu’ «il y a aussi certaines déclarations qui touche les Algériens telles que les dernière déclarations qui ont conduit à une rupture des relations d’une manière totale».
L’expert a appelé le Maroc à revoir et réviser toute ses conduites très porteuses et qui atteint la souveraineté et la dignité algérienne, «le Maroc doit changer sa politique extérieurs envers l’Algérie», a-t-il estimé.
Pour Bendjana, «le Maroc sait très bien que la situation mondiale change au détriment du Maroc et les Européens se trouvent dans des conditions très difficiles et les puissances qui les soutiennent elles- mêmes se trouvent gênées et elles se trouvent dans des conditions difficile».
De plus, notre interlocuteur nous a affirmé que «le Maroc essaye de trouver une brèche par lequel il émet des vœux pour l’Algérie».
A propos de la réouverture des frontières entre l’Algérie et le Maroc, Bendjana nous a dit que «le Maroc veut ouvrir les frontières sans prendre la peine de présenter des excuses aux Algériens. Il doit faire le maximum de régler le problème».
«Nous n’avons aucun problème avec le peuple marocain mais plutôt avec le régime marocain qui pose des problèmes à l’État algérien et il n’a qu’à trouver des solutions très correctes», a conclu Benjana.
Ces nouvelles déclarations inattendues de Mohammed VI interviennent au moment où le Maroc traverse une crise énergétique, aggravée ces dernières semaines par un conflit politique interne. Une collision interne provoquée principalement par l’aggravation de l’état de santé du roi. Le Makhzen joue-t-il ses dernières cartes ? Quel serait la réaction d’Alger ?